La Croatie est en train de réunifier son territoire national grâce à un pont. Près de 30 ans après son indépendance en 1991, la jeune république a entamé en 2018 la construction d’une infrastructure censée rattacher au reste du pays la région de Dubrovnik, aujourd’hui séparée par un petit bout de territoire bosnien d’une vingtaine de kilomètres à peine.
Il s’agit d’un gros dossier dans les Balkans. Depuis la fin de la Yougoslavie, la côte croate est interrompue entre Split et Dubrovnik (Split est la deuxième ville du pays tandis que Dubrovnik est une destination touristique très prisée). La Bosnie-Herzégovine a en effet hérité en 1991 du port de Neum située entre ces deux dernières, qui fit jadis partie de l’Empire Ottoman (au sein de la Yougoslavie socialiste, la ville de Neum appartenait à la Bosnie, considérée en quelque sorte héritière de l’Empire Ottoman). Ce qui explique que pour descendre dans l’extrême sud du pays et rejoindre une de leurs principales villes, les Croates doivent traverser deux frontières, l’une à l’entrée et l’autre à la sortie du couloir bosnien.
Les Croates eux-mêmes en sont les premiers gênés au quotidien, et l’été, lorsque des millions de touristes se rendent en Croatie, les formalités de contrôle douanier créent de longues files d’attente, exaspérant la population locale.
Les autorités de Zagreb et Sarajevo ont longtemps discuté d’une possible solution commune à ce problème, mais ce n’est qu’en 2017 qu’une réponse définitive a été trouvée par les Croates : un pont reliant la péninsule croate de Pelješac (en face de Neum) au reste de la Croatie, by-passant ainsi l’enclave bosnienne. Pour la construction des infrastructures nécessaires, Bruxelles a alloué une enveloppe de 357 millions d’euros, soit 85 % du coût total.
Mais cela n’a pas mis fin aux polémiques dans la région. Le gouvernement bosnien craint que son unique accès à la mer soit limité par la présence du pont. Certains hommes politiques de Sarajevo ont donc invité la Commission européenne à intervenir pour freiner la construction. D’autres ont même menacé de porter plainte contre la Croatie auprès du Tribunal international du droit de la mer à Hambourg.
Autre grand questionnenement, l’entreprise qui a remporté l’appel d’offres publié par Zagreb pour la construction de l’ouvrage est la société chinoise China Road and Bridge Corporation (CRBC). C’est la première fois qu’une entreprise chinoise touchera des fonds européens pour bâtir une infrastructure stratégique. De quoi préoccuper plusieurs hauts fonctionnaires européens, qui craignent des relations trop étroites entre les pays des Balkans et la Chine.
« L’Union européenne a sous-estimé l’influence de la Chine dans les Balkans », a déclaré Johannes Hahn, alors Commissaire européen à la Politique régionale et à l’Elargissement et désormais chargé du budget. Les entreprises chinoises sont en effet présentes dans tous les pays de la région, où elles bâtissent des autoroutes et des chemins de fer et investissent dans l’énergie ou encore dans les transports.
Sur la côte croate, l’arrivée des Chinois suscite néanmoins une certaine ironie. Une légende locale veut en effet que Marco Polo soit né sur l’île de Korčula, située juste derrière la péninsule qui héberge un des piliers du pont et où la famille du célèbre explorateur vénitien possédait une maison. Si cette histoire n’a jamais été prouvée (pour les Italiens, Marco Polo est bel et bien né à Venise), l’arrivée d’une entreprise chinoise en face de Korčula fait sourire les locaux. 700 ans après la mort de l’auteur du Devisement du monde, il semblerait que les Chinois soient revenus sur les traces du voyageur…
Photo © Giovanni Vale
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