L’actu du 3 janvier 2022 /
A partir du 1er janvier 2022 et pour six mois, l’Hexagone est sur le devant de la scène européenne. La France prend la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne qui réunit les 27 États membres et négocie les lois en tandem avec le Parlement européen.
Le rôle que joue la France est important mais l’exercice n’est pas nouveau. Notre pays avait déjà présidé le Conseil de l’Union européenne en 2008. Depuis, le traité de Lisbonne entré en vigueur fin 2009 a changé un peu les règles du jeu et des postes permanents ont été créés, comme celui de président du Conseil européen. Et surtout, l’UE a changé : Brexit, crises migratoires, Pacte vert…
Précision, le Conseil européen est l’institution qui regroupe les chefs d’État ou chefs de gouvernement des Vingt-Sept. Il se charge surtout d’organiser les sommets européens et a aussi un rôle de représentation de l’Union européenne dans le monde. Son président Charles Michel a été élu en 2019 pour deux ans et demi.
Depuis le 1er janvier 2022, c’est l’autre conseil que la France préside, celui qu’on appelle Conseil de l’Union européenne, qui réunit les ministres européens et qui a une présidence tournante de 6 mois par État membre.
Alors que va faire la France de cette PFUE, comme on l’appelle, la Présidence française de l’Union européenne ?
Le maître du temps
La présidence du Conseil de l’UE permet d’abord de choisir les thèmes qui seront discutés en priorité durant cette période. La Commission européenne a pu faire plusieurs propositions de directives ou de règlements, les « lois européennes », mais ce sera à la France de décider de celles qui seront débattues en premier entre les Vingt-Sept. L’objectif ensuite est de négocier avec le Parlement, une fois la position du Conseil de l’UE bien définie sur chaque loi. La France organisera donc les réunions de ce dernier. En fixant les ordres du jour, la présidence tournante influence l’ensemble de l’agenda législatif de l’UE.
L’art du compromis
Le rôle de la PFUE est surtout de faire émerger un compromis entre les intérêts divergents des États européens. La présidence du Conseil de l’UE se doit donc d’être neutre dans les négociations à Vingt-Sept. En théorie, Paris mettra donc en sourdine les intérêts propres à la France pour parler au nom de l’ensemble des pays membres. En réalité, les positions françaises sur la plupart des dossiers sont bien connues et la présidence ne rédigera jamais un compromis qui lui semble insatisfaisant.
La recherche d’un terrain d’entente a aussi lieu avec le Parlement. Lorsque les négociations sont plus avancées, que les eurodéputés et les États membres au Conseil de l’UE ont chacun rédigé leur position sur un texte de loi, ils se réunissent pour en rédiger une version commune. Le résultat de ces négociations constituera ensuite la législation qui entrera en vigueur. Et c’est à la présidence du Conseil de porter la voix des autres pays. L’ambassadeur de la France auprès de l’UE négociera donc seul face aux représentants des eurodéputés sur la base des consignes (le « mandat ») données par ses 26 homologues.
L’influence
La présidence du Conseil de l’UE met le pays qui la détient sur le devant de la scène européenne pendant six mois. Quand c’est le tour des petits pays, ou ceux plus récemment entrés dans l’UE, c’est un moyen de montrer leur capacité de faire avancer l’Union. Aboutir à des compromis ou adopter des textes après négociation avec le Parlement représente un vrai gain de reconnaissance et de notoriété. La France, elle, n’a pas besoin de booster son image. Elle est déjà influente par sa taille et son rôle fondateur et la posture de neutralité dans laquelle doit être une présidence ne lui permet pas de manœuvrer en sous-main comme elle pourrait le faire. Les déplacements réguliers pour des réunions d’experts ou de ministres dans l’hexagone sont par contre une excellente manière de doper l’attractivité du territoire et de faire marcher l’économie locale.
L’influence à Bruxelles sera par ailleurs entravée par l’agenda politique national : l’élection présidentielle les 10 et 24 avril va obliger le président français à jouer jusqu’à ces dates sur les deux tableaux, le national et l’européen. Ensuite, un changement de gouvernement au terme des élections aura un impact sur le positionnement de la France dans les négociations à Vingt-Sept.
Choisir ses combats
La Commission européenne avait identifié deux priorités pour son début de mandat : les transitions numérique et écologique. La France va donc piocher parmi les nombreux textes de lois mis sur la table — notamment dans ces deux domaines — et décider de ceux auxquels elle va dédier le plus de temps de négociation. Côté climat, Paris veut mettre l’accent sur l’instauration d’une taxation du carbone aux frontières pour faire payer aux importateurs le prix de leurs émissions de CO2. L’hexagone travaillera donc à obtenir une position unifiée du Conseil de l’UE sur la proposition faite par la Commission le 14 juillet dernier. Quant au numérique, l’ambition est d’avancer les négociations de la régulation des plateformes et services digitaux : deux textes ont été proposés fin 2020, le Digital Services Act et le Digital Markets Act.
En dehors de ces deux domaines-phares, d’autres sujets plus géopolitiques suscitent l’intérêt de la France.
Le 9 décembre, en présentant ses priorités devant la presse, le président français a ainsi évoqué un thème qui lui est cher : l’autonomie stratégique de l’UE. Pendant la présidence française, il veut pousser l’Union à s’affirmer par rapport au reste du monde, en diminuant sa dépendance à d’autres puissances économiques sur des produits stratégiques (le lithium pour les batteries ou les semi-conducteurs pour l’électronique par exemple).
Le président entend aussi revoir la politique de défense européenne. Il s’agirait de bâtir une véritable stratégie discutée entre les Vingt-Sept. Les Européens ne veulent plus se retrouver dépendants de la bonne volonté des Américains pour leur sécurité.
Autre dossier important pour la France : la réforme de l’espace Schengen face à la pression migratoire. La Commission européenne a présenté des propositions en ce sens le 14 décembre, pour mieux coordonner la gestion des frontières extérieures de l’UE, « y compris dans les situations où les migrants sont instrumentalisés à des fins politiques », et pour « faire en sorte que la réintroduction des contrôles aux frontières intérieures (à cause du covid notamment) demeure une mesure de dernier recours », selon les termes de l’exécutif. Ces nouvelles règles seront donc à négocier entre les États membres pendant la présidence française de l’UE.
D’autres thèmes s’imposent enfin d’eux-mêmes à l’agenda, comme la « conférence sur l’avenir de l’Europe », dont la France devra restituer les débats au printemps 2022.
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